Édition numérique - Acadie Nouvelle

L’élection fédérale de 2021: du pareil au même

HECTOR J. CORMIER Moncton

Avant le déclenchement des élections fédérales en août, je souhaitais que Justin Trudeau revienne à la raison et refuse d’appeler les Canadiens aux urnes. Pourquoi? Parce que la chose était parfaitement inutile d’autant plus que les Canadiens en avaient assez de subir les angoisses d’une pandémie grave. Le gouvernement montrait peu de signes de fatigue et il se trouvait toujours un parti de l’opposition pour appuyer l’un ou l’autre des projets de loi.

En 2019, les Canadiens avaient voulu un gouvernement minoritaire. Cela voulait dire, en termes simples, que les députés devaient, armés de leur influence et du pouvoir que leur avait confié l’électorat, et se diriger vers la colline parlementaire où ils seraient appelés à travailler ensemble, différemment, il est vrai, pour produire et adopter les meilleures lois possible pour améliorer le sort des Canadiens. Rien ne laissait entendre que le Parlement ne fonctionnait pas et, de plus, rien ne laissait entendre qu’il fallait une élection. Tout, cependant, laissait entendre que personne n’en voulait.

Mais, dans la tour d’ivoire du premier ministre, où on ne se lasse jamais de mariner dans le pouvoir, on n’entendait pas les choses ainsi. On voulait un gouvernement majoritaire. Le climat politique semblait favorable. Ainsi, on n’aurait plus à dépendre d’un parti de l’opposition pour l’adoption de lois.

Le jeune Trudeau, cependant, n’a pas parlé de majorité. Il voulait un mandat fort pour mieux contrôler la COVID-19 et mieux atténuer les conséquences qui en découlaient. Mais cela, il l’avait déjà. Et, la collaboration entre les partis était plutôt bonne. Quel argument restait-il, alors, pour convaincre les électeurs de la nécessité d’une élection, cette aventure qui a coûté, au bas mot, plus de 600 millions de dollars.

Les partis ont perdu quelques plumes, mais en somme le portrait politique est resté le même ou presque. Il y a même peu de nouveaux visages. Tout ce branle-bas pour rappeler au premier ministre que le vrai pouvoir réside avec la population laquelle a voulu, en 2019, un gouvernement minoritaire. Et il fallait gouverner ainsi. Les libéraux ont remporté 159 sièges, donc deux de plus qu’à la dissolution du Parlement, les conservateurs 119 ou deux de moins, le Bloc 33 (+1), le NPD 25 (+1), les verts 2 (-1). Du pareil au même.

Les Canadiens ont fait savoir à tout l’appareil politique qu’il fallait retourner à Ottawa, s’accommoder d’un gouvernement minoritaire comme c’était le souhait en 2019 et gouverner. Justin Trudeau s’est fait donner des tapes aux fesses. Il a perdu son pari et l’influence qu’il détenait la veille.

Il a dit dans son discours d’acceptation qu’il avait reçu «un mandat clair» de la part de la population, la chose est surtout vraie s’il entend par là que les Canadiens n’en ont pas voulu d’une élection, que le mandat de 2019 était «clair»: celui d’un gouvernement minoritaire et sur ce, n’ont pas changé d’idée. Il a plus que raison lorsqu’il dit: «Ça ne vous tente plus qu’on parle de politique et d’élections. Vous voulez qu’on se concentre sur le travail qu’on a à faire (…)». Et, de cela, il n’en manque pas: mentionnons, entre autres, un déficit énorme, une quatrième vague de la COVID-19 et la crise climatique.

Les Acadiens et les francophones hors Québec étaient heureux de la révision de la loi fédérale sur les langues officielles qu’allait présenter en Chambre la ministre Mélanie Joly à la veille du scrutin. Espérons que tout cela n’aboutira pas sur les étagères.

Pour ce qui est d’Erin O’Toole, il a tenté de ramener son parti vers le centre alors que sa base veut être de la droite et de l’extrême droite. Il a peut-être servi une partie des siens sur un plateau d’argent à Maxime Bernier, notre petit Trump canadien. Dans son discours de concession, O’Toole, plutôt que de parler de la façon dont il allait collaborer avec le gouvernement, s’est déjà lancé en campagne électorale pour faire la «guerre aux Libéraux». Comme moyen d’enrayer le cynisme, rien de mieux!

Les gouvernements minoritaires ont du bon, et il peut en sortir des politiques formidables. C’est sous le gouvernement minoritaire de Lester Pearson que les Canadiens ont obtenu un plan d’assurance-santé universel: c’était l’exigence de Tommy Douglas du Nouveau parti démocratique pour que les Libéraux puissent demeurer au pouvoir. Si Jagmeet Singh osait bien jouer ses cartes… ■

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