Édition numérique - Acadie Nouvelle

À la recherche de regards solidaires

Gabrielle Viger Moncton

J’ai toujours eu beaucoup d’enthousiasme face au travail, mais beaucoup de difficultés à garder un emploi.

Apparement, selon Statistiques Canada, 30% des personnes avec un trouble bipolaire ont le même défi que moi.

Travailler a toujours été parsemé de hauts et de bas, de bas très vertigineux. Je dirais même, de chutes casse-cou.

Une accumulation, maintenant que j’approche la quarantaine, de cassures professionnelles. Et je les prenais toujours très personnellement, ces rapports brisés.

Comme une série d’échecs.

Mais la vie continue, je soigne mes amitiés et mes relations avec la famille comme je peux. Lorsque j’ai des bonnes passes, je panse les blessures occasionnées durant les mauvaises. Sauf que le professionnel pardonne moins. Parce que lorsqu’on fait un «burnout» avant d’avoir une permanence, on se fait remplacer, c’est aussi simple que ça.

Le coeur crevé, à répétition, j’accumule un C.V. troué. Parfois on me dit: «wow, tu as un parcours très varié», mais la majorité du temps, on ne me rappelle pas pour une entrevue. J’ai 37 ans et je n’ai jamais gardé un

– Illustration emploi à temps plein plus d’un an, je ne peux pas les blâmer.

Mais me voilà en train de m’apitoyer sur mon sort. C’est difficile d’être pleine d’espoir, quand on souffre de dépression chronique, due au trouble bipolaire de type 2, diagnostic obtenu il y a 10 ans.

Et mon coeur qui est d’une sensibilité extrême à mon entourage n’aide pas mon cas, non plus! Un trouble de personnalité limite vient de m’être diagnostiqué récemment. Ou comme mon psychiatre me l’a d’abord présenté, «vous avez une personnalité instable». Ouch!

Statistiques Canada indique que les troubles mentaux représentent au moins 14% des années de vie perdues en raison d’une incapacité depuis 1990. Vous, chers lecteurs, savez donc peut-être de quoi je parle?

Pourquoi je vous dis tout ça? Pourquoi je ne me ramasse pas le moral en privé? Pourquoi l’étaler sur la place publique?

Parce qu’il est grand temps que j’assume qui je suis. Que je sorte de ma cage de honte que je me suis fabriquée inconsciemment et dans laquelle je croupis depuis plusieurs années.

Et comment je compte le faire, ce saut vers la vie «normale» (entre gros guillemets!)?

Avec vous! Eh oui, je ne vous connais peut-être pas encore, mais ce qui me manque le plus depuis des années d’isolement, c’est la solidarité humaine.

Dès que ce texte sera publié, la serrure de ma geôle sera déverrouillée.

Comme une prisonnière trop longtemps emprisonnée dans la noirceur, je vais être éblouie, au début. Je chercherai vos paires d’yeux, en ce moment posées sur mes mots, dans la foule, pour m’y accrocher. Jusqu’à ce que ma vision se rétablisse. Ma vision du monde et de moi-même.

Pour toute personne souffrant de troubles de santé mentale, sachez qu’il y a de l’aide. Je vous suggère de commencer avec l’extraordinaire Centre de santé mentale communautaire sur la rue Albert à Moncton.

Mais si vous êtes en détresse grave, faites comme moi et rendez-vous aux urgences les plus près, où il y a plusieurs regards solidaires qui vous attendent, notamment au département de psychiatrie de l’hôpital Georges Dumont à Moncton.

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2023-01-28T08:00:00.0000000Z

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