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Achat forcé d’énergie nucléaire: un «grave problème», selon un chercheur

Un nouveau projet de loi qui obligerait Énergie NB à acheter de l’énergie de petits réacteurs nucléaires expérimentaux fait sourciller un expert du secteur de l’énergie et les partis d’opposition.

Alexandre Boudreau alexandre.boudreau@acadienouvelle.com

Le projet de loi du ministre des Ressources naturelles et du Développement de l’énergie, Mike Holland, crée une exception à la Loi sur l’électricité.

«En ce moment, la loi oblige Énergie NB à acheter de l’énergie au prix le moins élevé. Nous savons que les premiers PRM (petits réacteurs modulaires) vont tomber en-dehors des limites de cette loi, donc la société ne serait pas en mesure de l’acheter», a dit le ministre.

Son projet de loi sert donc à éviter cette limite et à obliger Énergie NB à acheter l’énergie des deux premiers petits réacteurs nucléaires modulaires qui seront construits au N.-B., et ce, même si le coût de cette électricité sera probablement plus élevé que d’autres sources d’énergie.

Mike Holland affirme que cette énergie deviendra moins dispendieuse quand un plus grand nombre de modèles auront été complétés.

Pierre-Olivier Pineau, professeur titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie à HEC Montréal estime que l’achat forcé de cette énergie est «un grave problème» puisque d’autres entreprises à l’extérieur du Canada pourraient être les premières à développer cette technologie.

Il affirme que les provinces n’ont pas réellement exploré les autres options.

«L’Ontario développe et investit des milliards dans des PRM de GE-Hitachi, sans non plus avoir fait des analyses comparatives des coûts des alternatives. Cette préférence pour le nucléaire devrait être justifiée par des arguments», juge-t-il.

Il s’étonne d’ailleurs que le N.-B. veuille investir autant dans cette technologie. Il estime que le N.-B. devrait laisser «d’autres joueurs plus grands et avec plus de moyens développer cette technologie».

«Le Nouveau-Brunswick a déjà payé un fort prix des risques nucléaires (dépassement de coûts et des délais avec la réfection de Point Lepreau), il est très étonnant qu’il s’engage encore à payer pour une technologie qui n’est pas encore commercialement disponible.»

UNE LOI «BIZARRE»

Pour David Coon, chef du Parti vert, cette loi est «bizarre» et représente par le fait même un aveu que cette source d’énergie n’est pas viable sur le plan économique.

«Je pense que c’est un aveu du gouvernement que [ces réacteurs] ne sont pas économiques, que l’énergie ne sera pas abordable. Alors ils déposent une loi pour forcer Énergie NB à acheter de l’énergie produite par les petits réacteurs nucléaires.»

Une partie du projet de loi indique aussi que le gouvernement provincial peut fixer un «prix maximal par mégawattheure» qu’Énergie NB devra payer pour cette énergie, et qu’il peut le faire par voie de règlement, soit par décret, sans passer par un vote à l’Assemblée législative.

David Coon estime que le gouvernement se mêle donc du travail de la Commission de l’énergie et des services publics, qui fixe normalement les prix d’électricité.

René Legacy, critique libéral en matière d’énergie, affirme que son parti n’a pas encore de position bien définie sur ce projet de loi. Il dit vouloir attendre d’étudier le texte législatif en comité pour en savoir plus.

«Il nous manque énormément d’informations. C’est une chose de dire qu’on peut acheter l’énergie à un prix plus élevé, mais est-ce qu’il y a une limite? De combien de mégawatts parle-t-on?» ■

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2023-11-07T08:00:00.0000000Z

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