LA VENGEANCE, NON! LA VIOLENCE, OUI, MAIS...
SERGE COMEAU SERGECOMEAU1@ICLOUD.COM
Cette guerre-là ne se terminera pas sans combat. J’estime même la violence nécessaire pour faire triompher la paix. Or, ce n’est peut-être pas celle à laquelle nous pensons spontanément.
Non pas la violence tournée vers l’autre; il faut parfois se faire violence à soi-même pour lutter contre ses passions internes. «Il faut de la violence pour faire la guerre, il en faut aussi pour faire la paix.» Cette expression judicieuse résume les combats à mener. Il faut choisir le bon.
Pour comprendre la rage meurtrière qui anime les belligérants, il faut regarder au-delà de la géopolitique et des aléas de l’histoire. Le conflit au Proche-Orient, tout comme celui en Ukraine et ailleurs, est aussi la résultante de ce que la philosophie antique et la psychologie moderne appellent les «passions». Ou le déferlement des passions.
Les progrès sociaux des derniers siècles ont fait advenir des codes moraux, des lois et des modes de gouvernance pour encadrer et saper (parfois) certaines passions humaines. Nous avons tendance à l’oublier: les passions mauvaises sont souvent tapies dans des recoins de la vie. Il y a un travail intérieur nécessaire pour limiter leur expression.
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Au Proche-Orient, c’est la vengeance qui motive les hostilités. Tout a commencé avec celle des Palestiniens, cristallisée malheureusement dans un groupe terroriste. La frustration de se savoir exclus, opprimés et ignorés de la communauté internationale a nourri un désir de vengeance chez plusieurs Palestiniens et fomenté la nécessité d’un geste d’éclat.
Les dirigeants du Hamas ont fait fi de conventions séculaires pour tuer, faire sourdre la peur et attiser la haine. Un évêque du nord de l’Afrique a résumé d’une manière judicieuse l’origine de cette guerre en affirmant que «la violence barbare du Hamas est sans excuse, mais elle n’est pas sans cause». S’en est suivi une riposte terrible de la part d’Israël. Plus qu’un moyen de défense, les attaques sont motivées par un désir de vengeance. Entre le Jourdain et la Méditerranée, les sources passionnelles sont à l’oeuvre et peu de gouvernants semblent avoir le leadership pour endiguer ce flot de violence inouïe.
La vengeance est toujours mauvaise conseillère. Les États-Unis l’ont appris au lendemain du 11 septembre: le conflit s’est enlisé sur une période de 20 ans en Afghanistan. La vengeance ne peut pas guider la politique d’un pays. C’est vrai pour Israël.
Au début de l’histoire biblique, la vengeance était signe d’honneur et de bravoure. Insulté, on se vengeait. À cause de la surenchère de violence, Moise a valorisé la loi du Talion, c’est-à-dire la réciprocité de la peine. On pouvait alors infliger à l’oppresseur une violence égale à celle qu’on avait subie.
Aujourd’hui au Proche-Orient, la vengeance est telle que les Palestiniens se sont vus arracher des yeux qu’ils n’avaient même pas. Si la loi du Talion devait être respecté à la lettre, l’observation de Gandhi demeure: «oeil pour oeil et le monde finira aveugle…». Nous y sommes presque.
À ses disciples qui lui demandaient si la loi du Talion devait toujours être observée, Jésus a répondu que c’est en raison de l’endurcissement des coeurs que Moïse avait formulé une telle loi. Viendra un jour où les coeurs seront capables d’aller plus loin sur le chemin de l’amour et du pardon. Mais ce jour semble si loin.
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À des milliers de kilomètres de Gaza, nous n’entendons pas le bruit des bombes s’écrasant sur les hôpitaux. Mais nous pouvons entendre les sources passionnelles de nos intérêts que nous cherchons souvent à protéger coûte que coûte. Trop de gens cherchent à faire taire leurs propres passions, croyant même pouvoir leur enlever leur toute-puissance en les oubliant. L’éducation permet d’apprivoiser les passions de haine et de vengeance. Il faut apprendre à canaliser, sublimer et modérer. C’est souvent lorsque nos passions nous inspirent des pensées mauvaises et des actes méchants qu’il devient impérieux de s’en détourner. Ça s’apprend. Aidons-nous les uns les autres.
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